Il était une fois des villages autonomes (suite) - Octobre
par Journal L'Attisée le 2024-10-14
PAR SYLVAIN LORD
Magasin général Théophile Duval
Né le 20 janvier 1890; il est le fils de Sauveur et de Séraphine Duval. Le 21 novembre 1911 à Saint-Jean-Port-Joli, il épouse Emma Dubé fille d’Octave et d’Élise Robichaud. En 1923, il se construit une maison qui lui sert aussi de magasin général. Il cède le commerce à sa fille Marie-Louise en 1957 qui le tient jusqu’en 1980. Il est décédé le 11 janvier 1965. Le bâtiment existe toujours; il a beaucoup changé et il est actuellement la propriété de la maison funé-raire De la Durantaye et Fils (4, chemin du Roy Ouest). Pour de plus amples informations sur ce commerce, consultez l’article en ligne de l’Attisée 1.
Magasin Théophile Duval 2
Magasin général François Lavallée
Né le 22 novembre 1856 à Saint-Jean-Port-Joli; il est le fils de Narcisse cordonnier et de Tharsile Gagnon. Le 14 septembre 1880 à La Pocatière, il épouse Georgianna Dionne fille de Joseph et de Luce Mignier dit Lagacé; il est décédé le 22 juin 1919. Ce commerce (63, de Gaspé Est) est très bien documenté 3 mais voyons ce qu’on en dit le journal La Patrie du 6 avril 1947 4: La plus vieille maison de commerce du comté de L’Islet est sans contredit le magasin Frs Lavallée Enrg, établi il y a 65 ans (donc 1882) par feu François Lavallée décédé en 1919.
M. Lavallée, comme son frère Xavier qui avait un magasin à Saint-Aubert, était né avec la bosse des affaires. Il a monté le plus gros magasin de St-Jean-Port-Joli, un édifice de trois étages (1893) et a construit un entrepôt tout aussi considérable (après 1903) où la population de Saint-Jean trouve tout ce qu’elle peut avoir de la farine aux harnais de chevaux et de l’huile à lampe à la mélasse.
Magasin Lavallée 5
M. Jean-Thomas Lavallée, fils du fondateur, a commencé au magasin avec son père il y a 40 ans, et est aujourd’hui le seul propriétaire du magasin. On ne peut mentionner le nom du magasin Lavallée sans parler le de M. Léo Legros qui est commis chez François Lavallée Inc. depuis 40 ans également. Il a commencé au service de la maison en même temps que M. Jean-Thomas Lavallée. Son nom restera toujours au nom de la maison Lavallée.
Magasin général Eugène Robichaud et le 1er Hôtel Bellevue
Eugène Robichaud est né le 20 juillet 1871; il est le fils d’Eugène et de Zélie Duval. Surnommé Petit, il est récemment marié (Joséphine Dubé) lors du recensement de 1901; il vit avec ses parents et se déclare cultivateur 6. Il exerce toujours ce même métier lors des recensements de 1911 et 1921 7. Il ouvre son magasin en 1922 au 20, chemin du Roy Est. À droite de la porte d’entrée, il y a l’épicerie et de l’autre côté, c’est le magasin général. La porte arrière donne sur la quincaillerie et au deuxième étage, il y a un bureau où le dentiste Gérard Plourde, de L’Islet, vient soigner ses patients. L’hôtel Bellevue prend lentement racine dans le bâtiment à partir de 1937 8 et l’établissement est relocalisé autour de cette période 9. La partie gauche de l’édifice est convertie en salle à manger et il y a des cabines à l’arrière sur la route 2 (maintenant 132). Le commerce est vendu en 1947 et deviendra l’Hôpital de Saint-Jean. Monsieur Robichaud est décédé le 6 janvier 1954.
Magasin Eugène Robichaud 10
Magasin général Odilon Toussaint
Odilon Toussaint (1882-1951) est le fils de Cyprien et de Joséphine Dupont. Le 7 juin 1910 à Saint-Jean-Port-Joli, il épouse Alice Bourgault fille de Magloire et d’Émilie Legros. Son commerce est situé au 348, de Gaspé Ouest. Le magasin est situé dans la partie ouest de sa maison où l’on retrouve principalement les denrées alimentaires mais aussi des vêtements de travail et un peu de linge. Les matériaux de construction sont entreposés dans un hangar à l’est de la maison qui est aujourd’hui démoli; le hangar à l’ouest existe toujours 11.
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Magasins d’alimentation
Autrefois tous les secteurs d’une paroisse avaient leur propre dépanneur, épicerie ou magasin général. Aujourd’hui, tous ces commerces se retrouvent au village.
Boucherie Érasme Chouinard
Remontons au père d’Érasme afin de mieux saisir l’historique de ce commerce. En 1881, Joseph Chouinard (1831-1902), son épouse Angélique Dubé (1837-1883) ainsi que leurs 9 enfants décident d’aller tenter leur chance aux États-Unis. Ils prennent le train pour Greenville au New Hampshire avec le mobilier, les caisses de vêtements et les articles de toutes sortes dont une machine à coudre. Il y a un noyau de gens de la région déjà établi dans cette ville et le dépaysement n’est pas trop grand. En 1883, la famille revient au pays derrière le cercueil d’Angélique qui a succombé le 29 mars. Sa dépouille est exposée chez ses parents adoptifs, Pierre Dubé et Clarisse Dutremble. Le 5 mai 1884, la famille s’établit au 125, de Gaspé Ouest. La vie aux États-Unis hante certains des enfants et c’est ainsi que Senneville (1868-1911), Érasme (1871-1939), Amédée (1873-1953) et Alfred (1876-1938) décident d’y retourner en 1891 12.
Érasme Chouinard et l'une de ses filles vers 1915 22
Érasme épouse Marie Lavery, fille d’Alfred et d’Emma Chouinard, le 20 avril 1896 à Greenville (NH); la famille Lavery était originaire de Saint-Jean-Port-Joli. Les nouveaux mariés reviennent dans la paroisse pour la naissance de leur premier enfant en 1897 puis retournent ensuite aux États-Unis. La famille revient pour de bon en 1900 avec trois enfants. Érasme est d’abord maquignon puis se fait graduellement boucher. Il est alors le seul à exercer ce métier dans la paroisse; auparavant les cultivateurs faisaient boucherie chez eux. Le 1er février 1901, il fait l’acquisition d’une petite maison (104, de Gaspé Ouest) face à ce qui est aujourd’hui Rousseau Métal 13; il l’agrandit puis construit un abattoir derrière celle-ci. La maison paternelle des Chouinard est juste à quelques pas un peu plus à l’ouest. À partir de 1901 et jusqu’à son décès, Érasme est cité comme boucher. Certains clients viennent acheter la viande à son commerce mais il fait aussi des « run » à cheval pour distribuer ses produits. La viande est conservée dans la glace; Érasme traîne avec lui balance, couteaux et autres articles nécessaires à la livraison à domicile. Les femmes sortent avec des plateaux et demandent les coupes de leurs choix 14.
La famille Chouinard-Lavery s’enrichit d’un enfant à presque toutes les années jusqu’en 1921 (16 baptêmes). En septembre 1917, la grange de M. Chouinard est la proie des flammes; le feu a été mis accidentellement par des petits garçons qui fumaient à la cachette 15. Plusieurs coupures de presse signalent l’implication de membres de la famille Chouinard dans des boucheries dont Hector (1899-1968) à Sainte-Perpétue, Agilas (1906-1953) à L’Islet, François (1909-1968) à Tourville, Fernand (1911-1985) à Sainte-Louise, Charles (1912-1991) à Saint-Jean-Port-Joli; quant à Roland (1917-1993), il n’est pas en reste avec le commerce d’animaux 16. Érasme rend l’âme le 17 avril 1939 17.
Charles succède à son père avec la boucherie de Saint-Jean-Port-Joli. En septembre 1958, il vend le commerce à son neveu Conrad Chouinard (1928-2016) 18. La famille de Charles déménage, à l’est de l’église, dans le bâtiment qui avait servi pour la Banque Provinciale du Canada au début du vingtième siècle. Cet édifice avait été reculé en 1957 pour permettre la construction du petit centre commercial. Charles aménage son comptoir de viandes dans ce nouvel emplacement qu’il a fait construire.
Conrad Chouinard poursuit la tradition de son grand-père sur site ancestral (104, de Gaspé Ouest); il revampe les installations vieillissantes pour les soustraire au poids des années. La compétition est devenue difficile avec le nouveau comptoir au village et la Coop qui est en activité depuis 1948. En 1965, Conrad Chouinard vend à Lauréat Caron 19 qui revend rapidement à l’Abattoir de Montmagny 20; cette dernière échange sa propriété avec Conrad Fortin (1927-1986) qui reprend la boucherie 21. Monsieur Fortin est originaire de Cap-Saint-Ignace et il poursuit la tradition de boucher dans la famille. Son grand-père alimentait les chantiers forestiers de la route de l’Espérance. Il cesse l’abattage qui se faisait en bas de la boucherie et commence à diversifier les produits offerts.
(Suite de Boucherie Erasme Chouinard dans l'édition de novembre)
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Notes:
1) Serge Picard, Une maison … Un jour - Le magasin Théophile Duval, L’Attisée, 9 septembre 2020, information tirée du site Internet : www.lattisee.com/actualites/view/4433/une-maison-un-jour-le-magasin-general-theophile-duval le 23 décembre 2022.
2) Ibid.
3) La Belle Époque – Auberge B&B 1893, Historique, informations tirées du site Internet : www.auberge-labelleepoque.com/historique le 28 décembre 2022
4) « Frs Lavallée Enrg a été fondé il y a soixante-cinq ans », La Patrie, 69e année, no 33, Montréal, 6 avril 1947, p. 89
5) Musée de la mémoire vivante, informations tirées du site Internet : http://parcourssjpj.azurewebsites.net/ParcoursSousThemes/AfficheSousTheme?SousThemeId=8 le 3 novembre 2022.
6) BAC, Recensement de 1901 de St-Jean-Port-Joli, district 165, sous-division 2, ligne 22.
7) Annie Labastille, Saint-Jean-Port-Joli – 1767-2017, La Plume d’Oie, Berthier-sur-Mer, 2017, p. 1058.
8) « Objets perdus », Le Soleil, 56e année, no 180, Québec, p. 18. C’est la première mention de l’hôtel; il est donc en activité depuis cette date.
9) Le Circuit du patrimoine bâti de Saint-Jean-Port-Joli mentionne que l’hôtel Bellevue n’a pas vécu longtemps et qu’il aurait été entrepris en 1946. Cette information est en contradiction avec le déménagement de 1938 mentionné dans certains documents; il faudrait vérifier le registre foncier du Québec pour avoir des informations plus précises.
10) Musée de la mémoire vivante, Témoignage de Georgette Morneau, informations tirées du site Internet : http://parcourssjpj.azurewebsites.net/ParcoursSousThemes/AfficheSousTheme?SousThemeId=8 le 3 novembre 2022.
11) Musée de la mémoire vivante, Témoignage de Jean-Guy Toussaint,, 2008.
12) Yolande Chouinard, La maison où je suis née, publication privée, septembre 2002.
13) Greffe de Me Louis-Zéphirin Duval, Vente de Damase Dubé à Érasme Chouinard, minutes 3818, 1er février 1901, no enregistrement 35,898.
14) Archives familiales privées.
15) J. Arthur Fournier, Mémorial de Saint-Jean-Port-Joli, Musée de la mémoire vivante, 2012, p. 351.
16) Ses frères cités sont tous bouchers tandis que Roland fait le commerce d’animaux
17) Archives familiales privées, op. cit.
18) Registre foncier du Québec, Vente de Charles Chouinard à Conrad Chouinard, 29 septembre 1958, no enregistrement 78,021.
19) Registre foncier du Québec, Vente de Conrad Chouinard à Lauréat Caron, 11 mars 1965, no enregistrement 85,863.
20) Registre foncier du Québec, Vente de Lauréat Caron à l’Abattoir de Montmagny, 16 septembre 1965, no enregistrement 86,611.
21) Registre foncier du Québec, Échange entre l’Abattoir de Montmagny et Conrad Fortin, 2 septembre 1970, no enregistrement 93,455.
22) Archives de la Côte-du-Sud, Boucherie Érasme Chouinard, collection Angéline St-Pierre. Cette maison était située face à Rousseau Métal.