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La zénitude par la nature
par Journal L'Attisée le 2020-07-12

Mon plus ancien souvenir de l’effet que la nature a sur moi, je ne peux pas le dater précisément mais je dirais que c’est avant l’adolescence ou au début de celle-ci. L’image et la sensation que j’en ai gardées, elles, sont très claires : C’est une magnifique journée de fin d’hiver, je suis seule sur la rivière Bras St-Nicolas tout près de la maison familiale ; la neige est encore d’un blanc étincelant, juste avant que le printemps ne commence à la ternir. Tout à coup, sans raison, je me mets à tourner sur moi-même les bras en croix, le visage tendu vers le soleil dont les rayons sont enfin chauds et j’ai ce sentiment profond que c’est un moment de bonheur.


Je retrouverai ce sentiment de plénitude à plusieurs reprises par la suite, toujours en lien avec la beauté de la nature. Il n’y a que depuis que nous sommes neuf à table lors des réunions familiales, depuis que j’ai l’immense bonheur d’être grand-maman que ce sentiment me visite d’une autre façon. Mais au fond, la magie de la conception d’un petit être relève aussi de la nature n’est-ce-pas?


J’aime profondément les marches en forêt ; parcourir notre si beau « Domaine de Gaspé » m’apaise, me donne le sentiment d’être vivante et de faire partie de quelque chose de beau. J’ai aussi aimé les innombrables marches au terrain de golf de Montmagny ; d’abord comme cadet pour mon père puis avec une cousine comme joueuse, très peu talentueuse avouons-le. Aussi bien l’été que lors de l’explosion de couleurs l’automne, l’odeur, la douce sensation de marcher sur l’herbe, la vue qui portait loin, jusqu’au fleuve par endroits, me remplissaient de joie plus sûrement que le jeu lui-même. Même la rosée et les couleurs du petit matin me ravissaient, moi qui pourtant n’étais pas une lève-tôt naturelle.


Et que dire de nos excursions au chalet familial en plein bois? C’était une autre époque pour ce qui est de la sécurité des enfants mais quand nous prenions le sentier, qui n’en était pas vraiment un, qui partait d’un rocher offrant un point de vue magnifique de la région et descendait en lacets improbables jusqu’aux champs en contrebas, Daniel Boone pouvait aller se rhabiller, NOUS étions de véritables exploratrices. Même la peur des couleuvres faisaient partie de l’expérience. Lorsque certains dimanches, nous prenions la direction du terrain de golf ou que nous traversions la deuxième section de boisé et de rochers et l’autre enfilade de champs jusque chez un de nos oncles, nous pouvions disparaître pendant 3-4 heures sans que nos parents ne s’inquiètent. Et nous revenions remplies de toutes sortes de sensations, sales mais tellement fières.


Toujours cette odeur spéciale des sous-bois, le froissement des feuilles sous le vent, la dentelle que dessinaient les rayons de soleil qui perçaient le feuillage des arbres, les cocottes de pin ou les cailloux que nous ramassions, dont les formes n’avaient de limites que notre imagination débordante, constituaient de véritables trésors.


Mais là où la nature me comble le plus, ce sera toujours à la mer. Que ce soit en regardant mes fils essayer d’entrer dans l’eau glacée en criant en Gaspésie, en marchant pendant plus d’une heure sur la plage d’Old Orchard dans le Maine ou en admirant la baie de Naples en Italie, ma respiration ralentit, s’accorde au mouvement des vagues, mes pupilles se dilatent devant tant de beauté et je remercie le ciel ou la force divine quelconque qui me permet de vivre ce moment hors du temps.


C’est sur les plages des Caraïbes que cette joie atteint son paroxysme. Avancer dans l’eau chaude et transparente en crispant mes orteils dans le sable profond, être au milieu d’une nappe de minis étoiles scintillantes que le soleil dépose sur la mer, respirer l’odeur iodée et entendre le doux bruit du ressac, tout cela m’apporte la sensation que rien de mauvais ne peut m’atteindre, mes éternelles inquiétudes et ma tendance à la mélancolie sont oubliées. Tout-à-coup, elle n’est que joie et bien-être la vie, je touche au bonheur avec un grand B.


La nature me guérit, m’apaise et me fait me sentir proche de papa qui l’aimait tellement qu’il m’a transmis cet amour et ce respect profond.


Merci.

Suzanne Chabot



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