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Les amis du Port-Joli vous informe - Les stations de télégraphe optique
par Journal L'Attisée le 2020-02-09


Les stations de télégraphe optique


Codes des télégraphes optiques

Chaque station comptait six télégraphistes et le travail était monotone, mais exigeant : il fallait surveiller de façon constante les stations télégraphiques situées en amont et en aval, dans l’attente d’un message à relayer. Les messages sont transmis par un ensemble de boules disposées sur une vergue, soit une longue pièce de bois fixée perpendiculairement à un mât, lui-même ancré verticalement dans le sol. Dans le devis de construction pour le télégraphe optique de l’île Brulée, il est spécifié que le mât devait avoir 18,3 m (60 pi) de haut et devait supporter une vergue unique de 18,3 m (60 pi). Différentes pièces de charpente devaient également être fournies afin d’étayer le mât.1

Plan du télégraphe optique de l’île Brûlée


(Dessin : Pierre Giard) Schéma du télégraphe optique


(Carte de Joseph Bouchette, 1815) Localisation du télégraphe optique à l’île Brûlée


Dans le système décrit par Kempt, l’emplacement des boules sur les vergues permet de représenter les nombres de 1 à 4 999. Chaque nombre correspond alors à un mot ou à une expression, qui se trouve consigné dans un manuel de codes secrets. Les lettres de l’alphabet sont également représentées par un chiffre, ce qui rend possible l’épellation des mots qui n’ont pas été prévus au manuel. Par combinaison de mots et de lettres, même les messages les plus longs et les plus complexes peuvent être transmis.


Au début du mois de mai 1809 la curiosité des badauds de Québec est piquée par différents objets qui sont hissés sur le mât et la vergue du télégraphe de la citadelle. Les opérateurs font des exercices afin de bien connaître les différents signaux et se familiariser avec les manœuvres. Répondant à ces interrogations, le journal la Gazette de Québec publie, dans son édition du 18 mai, un tableau contenant la signification de ces signaux.


(Source : Bibliothèque et Archives Canada, collection de Peter Winkworth) Code des télégraphes optiques du Saint-Laurent, 1812.



L’opérateur utilise un système de cordes et de poulies pour hisser pavillons, flammes et boules. Les pavillons (pièce d’étoffe rectangulaire) annoncent des vaisseaux de guerre. Ils sont placés au haut du mât et, selon les couleurs, ils désignent quatre types de navires : L’Union Jack (vaisseau-amiral) ; bleu (vaisseau de ligne) ; rouge (frégate) ; blanc (corvette). Les flammes (pavillon de forme allongée) sous les pavillons montrent le nombre de vaisseaux de la description désignée par le pavillon sous lequel les flammes sont hissées. Les boules signifient des vaisseaux marchands. Au bras de l’est (des vaisseaux à voiles carrées) ; au bras de l’ouest (des goélettes et des bateaux). Ce code est modifié en 1843.


Le 28 février 1832, le gouvernement promulgue un Acte pour l’établissement de bureaux sanitaires en cette province, et pour mettre en force un système effectif de quarantaine. L’article 27 stipule qu’il sera établi une chaine de télégraphes entre Québec et la Grosse-Île. L’armée est responsable de la ligne et, dès avril, des travaux sont effectués : reconstruction de la station N° 1 ; construction de plusieurs bâtiments et la station de télégraphe à Grosse-Île. Le 1er août 1832, un premier signal est reçu à la citadelle indiquant l’arrivée à Grosse-Île de six navires, quinze bricks et neuf goélettes.


Les stations, excluant la Citadelle, sont mises en service au mois d’avril et sont démontées au mois de novembre. Un nouveau télégraphe, en pin rouge, est érigé à Saint-Laurent, au mois d’octobre 1830 et réparé en 1834. James Watt, surintendant des télégraphes, soumet en 1839, un rapport sur les réparations urgentes à faire aux différentes stations. Il mentionne que l’équipe responsable des opérations des cinq stations – Citadelle, Saint-Laurent, Saint-Michel, Saint-Vallier et Grosse-Île – est composée de vingt personnes : le surintendant (à la Citadelle), quatre assistants (un par station), quatre fonctionnaires, quatre militaires et sept employés civils.


(Peintre : Henry Hugh Manvers Percy ; source : Bibliothèque et Archives Canada, Acc. No. 1939-399-19/)
Peinture du mât de télégraphe optique de la Grosse-Île vers 1840 à l’endroit où sera construite la croix celtique en 1909.


La fin du télégraphe optique

En 1844, c’est la fin du télégraphe optique qui fut remplacé par le télégraphe électrique qui utilise l’alphabet Morse, inventé en 1832 et par le téléphone dans les années 1890. Une vente à l’encan a lieu le 25 août 1844 afin de liquider l’ensemble des magasins de la ligne de télégraphes optiques composé de blocs, balles, literie, pavillons, drapeaux, diamants de vitriers, peinture, poêles, télescopes, thermomètre, et autres articles.


Le télégraphe électrique

Notons que Samuel Morse inaugure la première ligne de télégraphe électrique en 1837. Un premier bureau de télégraphe ouvre ses portes à Québec en 1845 et la première liaison télégraphique entre Québec, Toronto, Buffalo et Montréal est inaugurée en 18472. Un premier bureau du télégraphe est ouvert à Kamouraska en 1856.


Ce système a énormément servi pour les communications maritimes. Voici une liste de stations radio-télégraphiques du littoral, communiquant avec les navires en mer durant l’année financière 1916 dans le secteur du chenal du Sud3 :

Pointe-au-Père avec une portée de 250 milles marins ;

Grosse-Isle avec une portée de 100 milles marins ;

Québec avec une portée de 150 milles marins.


Les premières compagnies de téléphone

Breveté en 1876 par Graham Bell, le téléphone fait son apparition sur la Côte-du-Sud à la fin du siècle. Les premières initiatives ne dépassent pas les limites de la municipalité. Cependant, la nécessité de relier les divers services locaux pour permettre la communication à longue distance entraîne la création de compagnies à vocation régionale. C’est ainsi que deux regroupements importants se forment sur la rive sud du fleuve à l’est de Lévis : la Compagnie de téléphone de Bellechasse et la Compagnie de téléphone de Kamouraska.


La Compagnie de téléphone de Bellechasse est fondée par un médecin de Lévis, le docteur J.-L. Demers. Elle concentre d’abord ses activités dans quelques paroisses des comtés de Lévis et de Bellechasse, puis elle étend graduellement son territoire vers l’est en reliant les diverses sociétés qui s’étaient formées à Montmagny, Rivière-du-Loup, Rimouski, jusqu’à Métis. Elle dessert également les municipalités de Kamouraska situées à l’intérieur des terres. En 1910, la compagnie prend le nom de Compagnie de téléphone nationale.


La Compagnie de téléphone de Kamouraska voit le jour en 1892. Après avoir acquis en 1903 la ligne de télégraphe longeant le chemin du Roi, de Rivière-du-Loup à Sainte-Anne-de-la-Pocatière, la compagnie raccorde son réseau à celui de la Compagnie de téléphone Bell en achetant la ligne reliant les paroisses du bas du comté de L’Islet. La Compagnie de téléphone de Kamouraska s’étend ensuite vers le Nouveau-Brunswick et le Bas-Saint-Laurent.


La concurrence entre les différentes sociétés qui desservent le territoire de la Côte-du-Sud se poursuit jusqu’à la Première Guerre mondiale. Une entente est alors conclue entre les parties : la Compagnie de téléphone de Kamouraska se retire du territoire de L’Islet et la Compagnie de téléphone nationale cesse d’opérer son service local dans le comté de Kamouraska. En 1927, cette dernière est acquise par Jules-A. Brillant de Rimouski, fondateur de ce qui deviendra la compagnie Québec Téléphone (aujourd’hui Telus), tandis que la société de Kamouraska cède à Bell la majorité de ses actions.4


Cet article est tiré du volume « Historique du chenal du Sud dans l’estuaire moyen du fleuve Saint-Laurent », Jean Parent, septembre 2018, pp. 57 à 62.

1 Tiré de Les îles de Kamouraska, une histoire au fil de l’eau, Pierre Giard, Les Cahiers d’Histoires N° 26, Société historique de la Côte-du-Sud, pp.95 à 103.
2 Extrait de Autour de l’île – Le télégraphe optique à Saint-Laurent (1809-1844), Jean-Claude Dionne, mars 2014, p. 21 et 22.
3 Extrait de Statistique Canada, Annuaire du Canada 1916-1917. https://www65.statcan.gc.ca/acyb02/1917/acyb02_1917048361-fra.htm
4 Extrait de Le télégraphe et le téléphone sur la Côte-du-Sud, http://encyclobec.ca/region_projet.php?projetid=144Jacques Saint-Pierre, historien, 2003.


Jean Parent, président des amis du Port-Joli





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