L’art de l’essentiel
par Journal L'Attisée le 2016-01-05
C’est le titre d’un excellent petit volume de Dominique Loreau dont m’avait déjà parlé une amie. Il est arrivé à point nommé dans mon existence, au début de l’année 2015. Juste au moment où la vie me faisait signe, m’interpelait. Comme elle n’obtenait pas de réponse, elle a décidé de me mettre sur le carreau pour quelque temps. Me forçant ainsi à m’arrêter, à lâcher prise et à remettre en question le petit tourbillon qu’était devenu ma vie.
Au cours de ce repos forcé, j’ai eu le loisir de réfléchir, de mettre en lumière ce qui avait tant grugé mes énergies. Ce qui ne contribuait plus à apporter tout le sens que je souhaitais donner à ma vie. Le temps des choix difficiles était venu. Certains furent plus douloureux que d’autres, mais ils allaient faciliter un nouvel ordre dégageant en moi plus d’espace pour l’essentiel.
Cette première étape franchie, j’ai ressenti le besoin de faire de même dans ma vie matérielle, la désencombrer. Ayant hérité du gêne familial : tout garder au cas où…, au fil des ans, tout objet ou tout bien faisant son entrée dans la maison s’avérait y avoir droit de cité pour l’éternité. Le verbe « jeter » semblait avoir disparu de mon vocabulaire. Même ce qui avait perdu tout intérêt, toute utilité ou était devenu complètement obsolète.
Imaginez les penderies dont les tringles ploient sous le poids de vêtements dont plusieurs n’ont pas été portés depuis des lunes. Imaginez les tiroirs débordants de paperasses, certaines du temps de Mathusalem : le premier talon de chèque de paie et les suivants. Imaginez les armoires de cuisine remplies de verres, tasses, assiettes, chaudrons et ustensiles parfois ébréchés ou dépareillés, sinon en multiples exemplaires. Et que dire de la cave et du grenier où cohabitent bien des boites poussiéreuses remplies de souvenirs et de trésors familiaux : la dernière poupée à crinoline rose, une mèche de cheveux de mes 12 ans, la vieille valise de ma grand-mère, les lettres d’amour de mes parents, des tonnes et des tonnes de livres pouvant remplir la bibliothèque locale. On y trouve ce qui porte la patine du temps, tout ce qui n’est pas mort dans l’uniformité, ce qui porte aussi l’unicité et l’histoire de plusieurs vies.
Mais ce n’est pas tant le nombre et la diversité de nos possessions qui fait problème, mais bien l’attachement que nous leur portons quand vient le temps de choisir ou non de s’en départir. Pourtant, peu de personnes souhaitent vivre dans un musée; le trop risquant d’enlaidir même le plus beau. Le fait d’avoir trop de choses nous empêche aussi bien souvent d’en profiter pleinement.
Mais savoir quoi garder, quoi donner et surtout quoi jeter n’est pas une mince affaire, ni une tâche légère. C’est là, question de tri identitaire et pour ce faire, il vaut mieux d’abord bien se connaître. C’est Yoko Ono qui souligne : « La simplicité n’est guère simple ». Il faut traverser une forme de deuil, je dirais de multiples petits deuils au moment où l’on fait le choix de se délester du superflu, de l’inutile pour garder l’essentiel et faire de la place à l’instant présent. C’est le défi que j’ai décidé de relever en février dernier. Je vous en reparle…
Je nous souhaite : « Une bonne et heureuse année, des plus légère et place à l’essentiel en 2016!
Clémence Lord