Un acharnement méticuleux d’une rigueur scrupuleuse pour la véracité de ses découvertes et de ses renseignements a formé la carrière émérite d’une auteure de chez nous : madame Angéline Saint-Pierre, membre de la Société des écrivains canadiens et de la Société historique de la Côte-du-Sud.

La petite histoire de sa paroisse l’interpelle intensément de même que les gens qui en façonnent la trame et y gravent leurs empreintes à travers le monde. D’abord artisane et sculpteure, la future écrivaine a une passion pour les lettres qui lui impose un important revirement. L’image de la petite boule de neige lancée par une main timide, mais combien déterminée pour ne pas dire visionnaire qui n’arrête pas de rouler en étoffant sa corpulence, dessine aujourd’hui le zigzag de la carrière de notre auteure port-jolienne, Angéline Saint-Pierre. Dans notre modernité à haute vitesse qui ne parle que de ça va trop vite, pas l’temps de, elle brandit son panneau « stop » et lance son petit projectile… derrière elle pour afficher son Saint-Jean-Port-Joli comme le Port-Joli unique muni d’extraordinaires dons artisanaux et culturels.

« J’offre mes services à votre journal » annonce-t-elle tout de go à l’éditeur du Courrier de Montmagny-L’Islet un jour de septembre 1960. Secrètement dans son for intérieur, naissait l’idée et l’ardent désir de répandre la réputation déjà célèbre des artisans exceptionnels de sa paroisse. Ce tremplin la lance dans la « vraie » écriture pour enfin réaliser ses projets.

Son dieu de la sculpture, notre grand Médard Bourgault, est l’aîné de sa famille d’une quinzaine de bouquins. Elle le couronne par trois éditions de ce 1er ouvrage et par un second consacré à la gloire de ses œuvres. Dans son élan, la petite boule se gonfle en accrochant sur son passage les illustres Arthur Fournier, Eugène Leclerc, André, frère de Médard et Jean-Julien et l’unique Émilie Chamard. (Volumes disponibles à nos bibliothèques).

Son crayon chercheur a livré les secrets de L’église de Saint-Jean-Port-Joli en nous présentant un temple séduisant dans la majesté de son architecture, imposant dans ses œuvres de grands maîtres et la beauté de ses ornements dignes de la maison de Dieu qui garde le cap malgré une mer tourmentée qui détourne le parcours de sa culture religieuse millénaire.

Angéline bifurque ensuite dans une trajectoire culinaire avec les odeurs du bon pain et des desserts nappés de notre divine manne, le sirop d’érable. Sur une note nostalgique, elle nous prend par la main et nous amène au vernissage des plus beaux tableaux de nos ancêtres : coutumes, mode, temps de guerre et des fêtes d’antan. Sa volonté si tenace à enraciner par son écriture les vrais visages d’hier et leurs savoureuses intrigues nous interdit l’oubli. Petit test : quel titre méritoire a reçu Saint-Jean-Port-Joli en 2005? La Capitale culturelle du Canada.

Tristement en l’année 2013 après 53 ans d’écriture, la mine raccourcie de son crayon se casse alors que ses quêteux d’enfance lui adressaient leurs derniers adieux au nom de tous ses lecteurs. La tête sûrement remplie de projets devenus irréalisables par une santé trop fragile, elle doit céder devant l’inévitable approche de ses 85 ans.

Ce 21 février, là s’arrête la petite boule de neige devenue un monument recouvert de ses parures et de celles des idoles qu’elle a magnifiées. Leur exemple et leur enseignement sont la semence d’une nombreuse descendance qui nourrit toujours notre orgueil. Notre écrivaine s’en est allée trop effacée par un jour de froidure de l’hiver et des cœurs de ceux à qui elle a légué une part de notre belle renommée.

En cours de route, quelques signes d’appréciation ont salué son œuvre méritoire. Félicitations et remerciements sincères au CHSLD de Saint-Jean-Port-Joli « fier disons-le » d’accompagner les jours difficiles de cette grande dame, a ouvert pour elle une vitrine de reconnaissance solidement encastrée dans les murs de sa maison de soins compatissants pour confirmer une longue survie de souvenirs.

Angéline, nous nous souviendrons de toi. Nos hommages !

Rose-Hélène Fortin